Communiqué de Presse

LE ROLE DU MICROCREDIT DANS LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET L’EXCLUSION

La Commission économique et financière (Deuxième Commission) a achevé, cet après-midi, l’examen de la mise en oeuvre de la première Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté (1997-2006). Au cours du débat, des délégations ont souligné le lien entre l’élimination de la pauvreté et la croissance économique. Au niveau national, la bonne gestion des affaires publiques et l’élaboration de politiques macroéconomiques et microéconomiques, génératrices de plus-value et d’emplois productifs ont été avancées comme la condition préalable à une croissance économique soutenue. Ces politiques impliquent l’ouverture des marchés, la création de systèmes régulatoires transparents, le renforcement du système bancaire et l’établissement d’un processus participatif de prise de décisions, impliquant en particulier les populations concernées. Des délégations ont souligné la nécessité de conjuguer une telle approche à l’interdépendance des économies des pays. Les crises financières de 1997 et de 1998 ont montré à suffisance que de bonnes politiques, au niveau national, si elles ne sont pas soutenues par un environnement international favorable, ne pourront jamais aboutir à une élimination complète de la pauvreté, ont fait valoir ces délégations.

Reconnaissant l’importance de la croissance dans le développement économique et social et donc dans la lutte contre la pauvreté, les pays en développement ont mis l’accent sur le fait que leur croissance globale a atteint le niveau le plus bas de la décennie avec 1,7%. Ils ont souhaité que les impératifs de l’ouverture des marchés et des processus participatifs exigés, au niveau national, s’imposent également au niveau international. Ils ont demandé un accès accru aux marchés par l’abolition des mesures protectionnistes, la stabilisation des prix des matières premières et des biens et services et une redistribution des investissements directs étrangers. Les pays en développement ne demandent pas la charité mais l’assistance qu’ils appellent de leurs voeux va dans le sens du renforcement des services sociaux nécessaires aux populations affectées par la pauvreté, ont dit les délégations en demandant des mesures vigoureuses dans les domaines de la dette extérieure et de l’Aide publique au développement.

Les délégations ont cité le système des microcrédits comme un instrument efficace de lutte contre la pauvreté et d’insertion des groupes les plus défavorisés, notamment les femmes et les jeunes, aux mécanismes économiques et financiers nationaux. La dernière Réunion annuelle des Conseils des microcrédits, qui s’est tenue à Abidjan du 24 au 27 juin 1999, a d’ailleurs réaffirmé l’objectif d’accorder d’ici à l’an 2005, des crédits aux 100 millions de familles les plus pauvres du monde.

(à suivre – 1a) – 1a – AG/EF/264 12 octobre 1999

La pertinence des microcrédits réside dans l’octroi de prêts sans intérêt ou à de très faibles taux d’intérêt à des groupes de population qui n’auraient pas eu accès aux services bancaires traditionnels. Jusqu’à présent, les microcrédits se sont avérés être le mécanisme d’assistance au développement qui donne le meilleur retour sur l’investissement, ont souligné les délégations, qui ont souhaité une amélioration du système pour qu’il touche davantage les plus pauvres des pauvres.

Les représentants des pays suivants ont participé au débat: Roumanie, Ethiopie, Ouganda, Yémen, Philippines, Tanzanie, Kenya, Viet Nam, République de Corée, Pakistan, Népal, Tunisie, Japon et Jamahiriya arabe libyenne.

La Commission tiendra demain, mercredi 13 octobre à 10 heures, une table ronde sur le thème « Faire le point de la réforme de l’architecture financière internationale ». La Commission se réunira également vendredi 15 octobre pour entamer l’examen du point relatif aux activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies.

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MISE EN OEUVRE DE LA PREMIERE DECENNIE DES NATIONS UNIES POUR L’ELIMINATION DE LA PAUVRETE (1997-2005)

Débat général

M. OVIDIU IERULESCU (Roumanie) a cité le Secrétaire général qui, devant la dernière session du Conseil économique et social, avait alors déclaré qu’une croissance économique mondiale de 2% par an, ne permettra pas de dégager les ressources dont les pays les plus affectés par la pauvreté ont besoin pour réduire de moitié la pauvreté en l’an 2015. En fait, la croissance économique internationale devrait être beaucoup plus équilibrée et les flux de l’aide au développement devraient être ramenés au niveau qui avait été promis par les pays développés. La Roumanie tient à souligner que seule une coopération accrue et soutenue entre l’ONU et les institutions de Bretton Woods aidera à trouver les moyens et les politiques dont le monde a besoin pour lutter efficacement contre la pauvreté. La délégation roumaine accueille favorablement l’initiative prise par les pays du G7 à Cologne relative à l’allégement de la dette. La Roumanie fait face aux problèmes de pauvreté, bien qu’elle ait tout mis en oeuvre pour s’intégrer au nouveau système économique international. Nous comptons sur le système des Nations dont les actions, à travers les programmes du PNUD, de l’UNICEF et du FNUAP, ont contribué à soulager les manques dont souffre une partie de notre population.

M. BERHANU KEBEDE (Ethiopie) a souligné que la lutte contre la pauvreté incombe d’abord aux gouvernements des pays pauvres tout en ajoutant que la réalisation des objectifs en la matière exige un véritable partenariat international dans lequel les efforts des pays peuvent être appuyés de manière structurelle et consistante. Les appels en faveur d’une amélioration de la situation actuelle doivent s’intensifier sur plusieurs fronts, a dit le représentant, en invitant la communauté internationale à prendre des mesures substantielles pour apporter des solutions à la crise de la dette extérieure qui, a-t-il précisé, compromet depuis deux décennies la croissance économique et le développement social des pays en développement. La campagne en faveur d’un allégement de la dette doit se traduire en actions concrètes, a ajouté le représentant, pour s’assurer que, dans le nouveau millénaire, l’Afrique se libère de la dette et de la pauvreté. Pour lui, la création d’un environnement international favorable constitue un autre mécanisme par lequel la communauté internationale peut contribuer à la lutte contre la pauvreté en facilitant et en améliorant l’intégration des pays en développement dans l’économie mondiale. La communauté internationale doit envisager de placer la lutte contre la pauvreté au centre des négociations commerciales. Plaidant l’augmentation de l’APD, le représentant a indiqué que la priorité de son pays en matière de lutte contre la pauvreté est de développer le secteur agricole.

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La stratégie adoptée consiste à recourir à la nouvelle technologie et à élargir la portée des services sociaux. Dans ce contexte, un certain nombre de politiques ont été mises en place qui touchent les secteurs de la population, de la santé, de l’éducation, des femmes et de la protection sociale. Ces politiques ont la lutte contre la pauvreté comme dénominateur commun.

M. CHARLES EGOU-ENGWAU (Ouganda) a dit que son pays partageait la conclusion du rapport du Secrétaire général selon laquelle l’éradication de la pauvreté doit refléter la nature multidimensionnelle de ce phénomène et prendre en compte non seulement les aspects liés au manque de revenu financier dont souffrent les individus, mais aussi des aspects qualitatifs comme l’analphabétisme, la mauvaise santé, le manque d’accès aux services sociaux de base et aux moyens de production économique, l’insécurité, le sentiment d’impuissance et l’exclusion sociale. Les couches les plus pauvres de la population ont tendance à dépendre, dans les pays d’Afrique subsaharienne et notamment de notre région, de l’agriculture de subsistance et de l’assistance que peut leur offrir la famille élargie. Les zones les plus pauvres ont aussi tendance à être dénuées de services sociaux et de toute opportunité économique. On y remarque une certaine prévalence d’handicaps physiques et de maladies, en particulier et de plus en plus, le sida et le paludisme.

Le Gouvernement de l’Ouganda a pris des mesures décisives dans certains domaines, en vue de réduire l’incidence de la pauvreté. Nous avons imposé des mesures de contrôle budgétaire plus strictes et nous nous assurons que les allocations budgétaires reflètent les objectifs de lutte contre la pauvreté que nous nous sommes fixés. Nous avons lancé, d’autre part, un programme universel d’accès à l’éducation au niveau primaire, auquel nous allons bientôt joindre un programme au niveau de l’enseignement secondaire. Enfin, notre Gouvernement met l’accent sur les programmes de microcrédit et de crédit en faveur des jeunes entrepreneurs. Nous comptons, par certaines des mesures mises en oeuvre, faire participer les femmes au développement au même niveau que les hommes.

M. ABDULLA AL-MONTASSER (Yémen) a estimé que les statistiques contenues dans le rapport du Secrétaire général témoignent du fait que l’objectif de l’élimination de la pauvreté est encore loin d’être réalisé. Les programmes d’assistance sont toujours limités et ne parviennent pas à réaliser les objectifs désirés, a dit le représentant en souhaitant que le développement durable des pays en développement devienne la priorité dans la lutte contre la pauvreté. Les sociétés pauvres ne pourront jamais contribuer positivement à la sécurité et à la stabilité, en particulier dans la région du Moyen-Orient, sans un minimum de sécurité alimentaire et de dignité humaines. Pour sa part, le Yémen n’a épargné aucun effort pour assurer un développement humain durable.

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Le Programme mis en place en 1995 a eu des résultats probants mais il faut reconnaître que ce type de programmes de redressement économique et financier affecte les populations, en particulier les couches les plus défavorisées. Ainsi, en coopération avec les organisations internationales, le Yémen a décidé de prendre des mesures pour diminuer l’impact du redressement. Le Yémen a donc décidé de réduire les impôts des pauvres, d’encourager la création d’emplois, de faciliter la participation des pauvres au processus de prise de décisions, d’assurer une certaine complémentarité entre l’économique et le social, de renforcer les plans d’entraide en mettant en place un Fonds pour le développement social qui concerne 250 000 familles pauvres. En coopération avec les instances internationales, des programmes ont été lancés sur la création d’emplois productifs, le développement des petites entreprises, la formation professionnelle, et sur la promotion de la production familiale. Ces programmes ont conduit à la création de 90 000 emplois. Le Fonds de développement social a permis l’octroi de lignes de 300 crédits aux familles pauvres. Le chômage, a expliqué le représentant, a un impact certain sur la mise en oeuvre effective des plans de développement qui est contrariée par une démographie qui a atteint 3,7% en 1998. Si les programmes des Nations Unies sont une bonne solution temporaire à la lutte contre la pauvreté, a conclu le représentant, le partenariat entre les pays développés et les pays en développement constitue la meilleure solution.

M. LIBRAN N. CABACTULAN (Philippines) a estimé que le soutien de la communauté internationale est crucial pour les pays qui font des efforts en vue de réduire les incidences de la pauvreté sur la vie de leurs populations. Davantage de ressources extérieures devraient être mises à la disposition de ces pays à travers des mécanismes multilatéraux ou bilatéraux pour donner plus d’assise financière aux pays qui sont dans le besoin. A cet égard, les Philippines se sont réjouies des engagements pris par les pays riches concernant le versement d’une Aide publique au développement. Mais hélas, nous sommes loin des promesses qui avaient été faites. Les Philippines, comme nombre de pays du Groupe des 77 et la Chine, estiment que toutes négociations futures sur le commerce international devront donner aux pays en développement un cadre propice d’exportation, en leur ouvrant les marchés des pays du Nord. Ceci, en fait, ne serait que justice rendue, car les textes du Cycle d’Uruguay le prévoyaient déjà.

Comment les pays en développement pourraient-ils soutenir leurs politiques et leurs stratégies de lutte contre la pauvreté si le système économique international leur dénie toute assurance de stabilité dans le futur? Comment peut-on prétendre ne pas vouloir leur donner des garanties de stabilité financière, alors que le monde a constaté que des transferts brusques et incompréhensibles de fonds à court ou moyen terme peuvent faire sombrer des économies et mettre des millions de personnes au chômage? Une nouvelle architecture financière internationale devrait, impérativement, remédier aux faiblesses du système financier actuel.

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M. SEIF A. IDDI (Tanzanie) a fait observer que la pauvreté a souvent été associée au concept de mondialisation, phénomène inévitable comportant des avantages et des risques. Le représentant a précisé que pour les pays en développement, la pauvreté se trouve pérennisée par l’impact de la crise de la dette extérieure, l’absence de ressources adéquates, les faibles prix des biens et services et leur marginalisation accrue dans l’économie mondiale. En l’absence d’une participation pleine et effective des pays en développement dans la croissance économique mondiale, la pauvreté ne pourra être éliminée et l’objectif visant à la réduire de moitié d’ici à 2015 ne pourra être atteint. La pauvreté est une négation des choix et des opportunités. Elle se caractérise par le manque ou le caractère inadéquat des services sociaux de base. Il revient donc à la communauté internationale de créer un environnement favorable qui facilitera à tous l’accès à ces services, en particulier aux pays en développement. La communauté internationale doit aider les pays en développement à faire avancer l’ordre du jour de leur développement économique. Une attention particulière doit être accordée à l’émancipation des femmes qui travaillent sans relâche au bien de leurs familles et dans des conditions difficiles. Dans ce contexte, il est urgent d’accroître l’APD et de réaliser que les pays en développement nécessitent une assistance qui augmente leur capacité à diriger eux-mêmes les processus de développement et aller ainsi vers l’autosuffisance. Les pays en développement ont surtout besoin d’une action qui les aide à créer un environnement favorable à l’investissement du secteur privé, à savoir des aides à la construction des infrastructures et à la création de services.

M. PHILIP R. O. OVADE (Kenya) a déclaré que le Gouvernement du Kenya a créé une Commission nationale d’éradication de la pauvreté qui sera chargée de superviser et d’harmoniser les différentes initiatives prises dans le cadre de la lutte contre la pauvreté. Les agences de l’ONU et les ONG qui opèrent au Kenya ont décidé de soutenir le travail de cette Commission, qui est composée de personnalités du privé, du monde académique, des syndicats et des ONG. La participation du Gouvernement y est limitée à la fourniture de locaux et de moyens logistiques. Le Gouvernement du Kenya apprécie à leur juste valeur les engagements pris par le PNUD, la Banque africaine de développement et les autres institutions de financement et de développement en vue d’aider cette Commission à atteindre ses objectifs. Nous lançons un appel à la communauté internationale pour qu’elle mobilise plus de ressources en faveur des programmes d’éradication de la pauvreté, notamment dans les pays d’Afrique subsaharienne. Un partenariat franc et solide doit être établi pour discuter de la relance de l’APD, dont la chute met en péril de nombreux programmes qui sont d’une importance vitale pour un certain nombre de pays. Nous devrons aussi faire plus sur la question des investissements directs étrangers, dont les pays d’Afrique ne bénéficient pratiquement pas depuis le début de la mondialisation. Nous n’arriverons pas à éradiquer la pauvreté dont souffre la majorité des populations du monde, si nous ne faisons pas face à ces questions.

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M. LE HOAI TUNG (Viet Nam) a estimé que le succès dans la lutte contre la pauvreté exige que les efforts nationaux soit appuyés par la coopération et l’assistance internationales. Faisant part des initiatives de son pays en la matière, le représentant a indiqué que depuis l’indépendance en 1946, la lutte contre la pauvreté a toujours été la priorité de toutes les politiques du Viet Nam. Ainsi, la croissance économique annuelle qui s’est maintenue à 8% de 1992 à 1998, a permis de réduire annuellement le taux de pauvreté de 2%. Ces résultats encourageants sont le fait de la participation active de l’ensemble de la société à la campagne de lutte contre la pauvreté. Depuis 1986, année où le processus de réformes économiques a commencé, les gouvernements ont adopté une approche intégrée pour la lutte contre la pauvreté, qui l’inclut la question dans une stratégie globale de développement socioéconomique. Cette stratégie se fonde sur le postulat selon lequel le développement économique est une condition préalable à la mise en oeuvre des politiques sociales qui stimulent à leur tour le développement économique. La stratégie se fonde sur un autre postulat qui considère les pauvres comme la première cible des programmes en matière de lutte contre la pauvreté, et en particulier les femmes et les handicapés. Ceci consiste à faciliter l’accès à la terre, aux crédits et aux autres mécanismes de promotion d’emplois, de génération de revenus ou encore de formation. Enfin pour que l’intégration des femmes soit réussie, il convient d’aborder cette question en l’intégrant aux questions telles que les opportunités d’emplois, les soins de santé, la planification familiale ou encore l’éducation. Le représentant a terminé sa déclaration en se joignant aux appels en faveur d’un renversement de la tendance de l’APD. Il a ajouté qu’un environnement favorable à la lutte contre la pauvreté implique aussi l’établissement de systèmes commercial, financier et économique plus équitables; la solution de la crise de la dette extérieure ainsi que d’autres formes de coopération et d’assistance aux pays en développement.

Mme OH YOUNG-JU (République de Corée) a dit que l’on doit trouver des réponses urgentes à trois questions liées à l’accroissement du nombre de pauvres dans le monde. Peut-on changer la tendance à l’appauvrissement qui affecte la majorité du monde? Ce qui est actuellement fait pour faire face à la pauvreté dans le monde est-il réellement suffisant? Ne faudra-t-il pas chercher et adopter de nouvelles approches pour atteindre l’objectif de l’éradication de la pauvreté au niveau mondial? Selon le rapport du Secrétaire général, l’objectif de réduction et d’éradication de la pauvreté pourrait être atteint si certaines conditions favorables étaient créées au niveaux national et international. Premièrement les principes de bonne gouvernance devraient être mis en oeuvre partout, et une administration efficace secondée par un système judiciaire juste et équitable devraient exister partout où l’on veut lancer et réussir des programmes de développement social visant l’élimination de la pauvreté. Selon le dernier rapport de la Banque mondiale sur les tendances de la pauvreté et la situation des personnes et des communautés pauvres, la corruption est souvent une des causes premières de la situation de pauvreté.

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Des efforts doivent donc être déployés pour faire face à la corruption endémique qui affecte de nombreux pays. Deuxièmement la formulation et la mise en oeuvre de politiques économiques réalistes et viables par les pouvoirs publics sont fondamentales dans la lutte contre la pauvreté. Mais les politiques macroéconomiques devraient être contrebalancées par des politiques sociales visant à protéger les groupes les plus vulnérables. Enfin, la promotion sociale des pauvres est la clef de l’éradication de la pauvreté, et il est indispensable que des investissements soient orientés vers ces communautés sur le plan de l’éducation et de la santé.

M. HABIBULLAH TARAR (Pakistan) a constaté avec regret que presque tous les objectifs fixés dans le cadre de la lutte contre la pauvreté restent hors de portée. A l’aube du prochain millénaire, 1,3 milliard de personnes vivront toujours dans la pauvreté absolue et l’an 2015 qui devrait marquer une réduction de moitié de la pauvreté absolue verra en fait l’accroissement de cette pauvreté qui affectera, selon les estimations, 1,9 milliard de personnes. L’échec que la communauté internationale constate aujourd’hui, a déclaré le représentant, doit la conduire à s’interroger sur l’approche qu’elle a adoptée en matière de lutte contre la pauvreté. La pauvreté est- elle un symptôme ou une cause du sous-développement? La charité peut-elle l’éliminer? Peut-on isoler la pauvreté de l’ensemble des objectifs de développement? Sans entrer dans une quelconque polémique, il convient de souligner que, dans un contexte de mondialisation, les questions sont étroitement liées et que les efforts tendant à trouver une solution distincte à chaque question sont vouées à l’échec. Les politiques macroéconomiques en faveur des pauvres prises, au niveau national, ne peuvent fonctionner qu’en présence de politiques en faveur du développement, au niveau international. Les crises financières de 1997 et de 1998 ont montré à suffisance la capacité des chocs extérieurs d’ébranler les fondations des économies nationales, a souligné le représentant. De plus en plus, a-t-il poursuivi, des appels sont lancés en faveur d’une plus grande implication du secteur privé dans la lutte contre la pauvreté. Les pontes du cinéma et d’Internet se sont données la main pour mobiliser les ressources nécessaires à la lutte contre la pauvreté. Le représentant a estimé que si nobles soient ces intentions et louables ces efforts, la charité seule ne peut réaliser l’objectif visant à éliminer la pauvreté. Il a conseillé à ces célébrités de déployer leur énergie dans la promotion du développement en appuyant les pays en développement dans leurs efforts de créer un environnement économique international favorable au développement. Le représentant s’est arrêté sur un paragraphe du rapport du Secrétaire général concernant l’approche de la lutte contre la pauvreté fondée sur les droits de l’homme. Il s’est demandé si la pauvreté peut être éliminée par la seule reconnaissance des droits du pauvre et si les pays en développement, qui ont ratifié ces instruments, ont fait des avancées remarquables en matière de lutte contre la pauvreté. Pour le représentant, l’exercice des droits aux opportunités économiques et aux services sociaux de base doit être envisagé dans le contexte plus large du droit au développement.

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M. TAPS ADHIKARI (Népal) a associé sa délégation à la déclaration faite par le Guyana au nom du Groupe des 77 et de la Chine. Le problème de la pauvreté dans les pays en développement a atteint un tel niveau et des conséquences si graves que ce n’est plus un problème économique et social, mais un problème humanitaire. Le manque de ressources et de financements, le faible niveau d’équipement en infrastructures, le chômage, le faible niveau des revenus et la dégradation de l’environnement, entre autres, rendent la question de la pauvreté plus complexe que jamais. Il est temps, étant donné le nombre croissant de pays qui sombrent dans la pauvreté que la pauvreté soit perçue comme le problème le plus urgent auquel doit faire face l’humanité. Les pays en développement font face à un manque et à une raréfaction des ressources. Les pays développés devraient, face à cette situation qui ne fait qu’empirer, tenir les engagements qu’ils ont pris sur la question de l’Aide publique au développement (APD) et du financement du développement. De Rio à Beijing, en passant par Le Caire et Copenhague, que de promesses et d’engagements non tenus… Le niveau peu envieux des taux et des montants d’investissement directs étrangers vers les pays les plus affectés par la pauvreté et la chute continuelle de l’APD doivent être vivement dénoncés et les pays donateurs de la communauté internationale doivent assumer leurs responsabilités morales envers le reste de l’humanité.

M. MOHAMED FADHEL AYARI (Tunisie) a estimé que l’ampleur de la tâche en matière de pauvreté, sa complexité et son caractère multisectoriel nécessitent la contribution de tous. Les données fournies par les institutions spécialisées des Nations Unies démontrent la nécessité urgente d’une implication plus efficace de la communauté internationale dans la lutte contre la pauvreté en raison des menaces pour la paix, la sécurité et la stabilité internationales. Les engagements pris lors des Conférences des Nations Unies offrent, selon le représentant, une base solide au système des Nations Unies pour conforter l’effort qu’il déploie. Le représentant a exprimé sa satisfaction pour la tenue prochaine d’une session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le suivi du Sommet mondial pour le développement social qui, a-t-il précisé, fournira un cadre adéquat pour l’examen des progrès et ce, sous l’angle de la coopération internationale. La solution à la question de la pauvreté, a poursuivi le représentant, exige d’abord la solution des causse sous-jacentes, à savoir les problèmes liés au développement économique et social et à l’intégration des pays du Sud dans l’économie mondiale. Pour sa part, a affirmé le représentant, la Tunisie a toujours accordé au social la place qui lui revient dans le développement économique. Cette option se concrétise par l’importance des budgets sociaux, l’amélioration du pouvoir d’achat ou encore la prise en charge des catégories aux revenus modestes. L’importance que le pays attache au développement social se voit par la corrélation que ses politiques établissent entre le social et l’économique. Les efforts consentis ont engendrés des résultats encourageants qui montrent une baisse du taux de pauvreté de 25% en 1978 à 6% en 1998.

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Ces résultats probants ont été rendus possibles grâce à la création en 1993 du Fonds de solidarité nationale financé par les contributions volontaires des citoyens et des entreprises. Une Banque de solidarité nationale a également été créée pour développer les programmes de microcrédits. Dans ce contexte, le représentant a renouvelé l’appel de son pays en faveur de la création d’un fonds mondial de solidarité qui contribuerait à la lutte contre la pauvreté et au développement des régions les plus démunies comme les pays pauvres en proie aux fléaux et aux crises. La Tunisie entend poursuivre ses consultations afin de donner à cette proposition ses chances de succès tout en accordant un contenu concret aux engagements de Copenhague. La lutte contre la pauvreté doit certes être une priorité politique mais surtout un devoir sacré. C’est une tâche que tous doivent accomplir car il y va de la dignité des nations riches et pauvres, a conclu le représentant.

M. HIDEAKI MARUYAMA (Japon) a déclaré que l’on sera sûr d’avoir trouvé la solution au problème de la pauvreté que lorsqu’on aura su mettre fin au cercle vicieux des causes et des circonstances qui sont à l’origine de son existence. Le Japon pense qu’une approche basée sur l’observation de résultats tangibles devra être poursuivie par tous les partenaires du développement sur cette question. Chaque acteur du développement devra faire une projection des résultats qu’il compte obtenir, avant de mettre en oeuvre toute politique de lutte contre la pauvreté. Les performances devront être quantifiables et vérifiables à court et moyen termes. Cette approche devra être abordée et mise en oeuvre de manière participative, et dans un cadre de coopération soutenue entre les différents partenaires et les avantages comparatifs dont bénéficient les Nations Unies par rapport aux autres organisations et agences internationales, grâce à leur neutralité, leur universalité et leur caractère multilatéral et leur polyvalence, devront être pleinement utilisés. Toutes les institutions, dont celles de Bretton Woods, et celles de la société civile et les ONG, devraient être invitées à travailler de plus près de manière coordonnée avec les Nations Unies.

Dans le contexte actuel de développement, il est clair que l’Afrique a besoin de plus d’attention que les autres parties du monde. Si l’Afrique doit atteindre l’objectif de réduire de moitié la pauvreté en l’an 2015, son taux de croissance doit être d’au moins 7% par an, ce qui pour le moment est loin de la croissance de beaucoup de pays africains. Par conséquent, la communauté internationale devra redoubler ses efforts en faveur du développement de l’Afrique. Le Programme d’action de Tokyo, adopté lors de la Deuxième Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD II), a encouragé les pays africains à prendre des initiatives en vue de leur propre développement. La coopération interafricaine et celle avec les pays développés et les organisations internationales devront être renforcées.

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Pour assurer le suivi de TICAD II, le Gouvernement du Japon a, avec le soutien du Gouvernement du Kenya, organisé un séminaire de haut niveau à Nairobi, au cours duquel les pays africains ont été invités à discuter des voies à travers lesquelles l’allégement de la dette pourrait être mis au service du développement social. Avec le soutien de la Malaisie, le Japon est d’autre part en train de préparer la tenue d’un forum des affaires Afrique- Asie à Kuala-Lumpur à la fin de ce mois, afin de promouvoir le commerce et les investissements entre l’Afrique et l’Asie.

M. ALI AL-AUJALI (Jamahiriya arabe libyenne) a affirmé que l’environnement international n’a cessé d’entraver le développement à long terme des pays en développement, développement nécessaire à l’élimination de la pauvreté et au bien-être économique et social. Il a donc appelé à des mesures urgentes pour s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et renforcer la capacité des pays en développement à protéger leurs populations les plus vulnérables. Le développement, a poursuivi le représentant, est un processus complexe qui demande une approche globale et qu’une attention particulière soit accordée aux secteurs ou groupes les plus vulnérables de la société. Les efforts de développement mal mené peuvent s’accompagner, en effet, de disparités, de contradictions et de la marginalisation de certains groupes. Dans ce contexte, l’accès généralisé aux services sociaux de base doit devenir l’élément fondamental des objectifs de développement durable. Le concept d’intégration sociale est certes complexe mais sa réalisation consolide la justice sociale, a insisté le représentant en plaidant, une fois encore, pour la prise en compte des besoins des groupes vulnérables et défavorisés pour, a-t-il dit, éviter les divisions, la marginalisation et l’aliénation sociale qui risque de donner lieu à la violence sociale et aux hostilités. Le représentant a réservé son dernier mot à un plaidoyer en faveur de la mobilisation des ressources et du transfert de technologie pour, a-t-il souligné, permettre aux pays en développement d’assumer leurs responsabilités en matière de développement économique et social durable.

Source : un.org

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